No Surrender
Mon histoire ne m’appartient pas tout à fait, c’est une façon un peu étrange de commencer j’en convient mais, ma vie telle que je l’ai toujours connue, imaginer et espérer c’est effondré il ne m’en reste aujourd’hui qu’une vague image, une façade que je présente jour après jour quand en réalité je ne fais que hurler au plus profond de mon âme…J’ai grandie ici à Grayson un bled paumé au milieu de nulle part ou tout le monde se connaît, ou tout le monde vous sert le même blabla sur le fait que notre histoire et notre village est et doit rester préservé du monde qui nous entourent, un principe que j’ai toujours trouvé noble bien qu’un peu régressif mais, maintenant, maintenant je pense que c’est pour mieux préserver les secrets de chacun, par peur de l’inconnu aussi et je suis devenue comme eux, avide de rester dans cet environnement familier, loin du monde, de me laisser vivre en attendant…le problème c’est que je n’ai aucune idée de ce que j’attends, parfois je me dis que j’attends que la douleur passe, que la vie reprenne son cours mais, au fond de moi et malgré ce que tout le monde me répète sans cesse, je sais que cette douleur ne passera jamais, rien ne pourra remplacer le vide que mon frère a laisser…rien.
Quelques mois auparavant, j’explorais New-York, je découvrais, grandissais, profitais tout ce qu’une gamine de 22 ans ferait dans ces conditions en somme et aujourd’hui j’ai juste l’impression de vivre une autre vie, celle de quelqu’un d’autre, j’essaye tellement fort de dépasser ces sentiments, de me donner une bonne claque, de vivre pleinement pour deux mais certains jours je n’y arrive tout simplement pas. Le reste du temps je suis la Carter que tout le monde connaît, la gamine du coin, celle qui parle trop, qui en fait toujours un peu trop aussi mais qu’on aime bien quand même, parce qu’elle est toujours restée fidèle à elle-même, parce qu’elle est toujours la fille du coin, celle qui ne prétend pas être plus que ce qu’elle est, celle qui est revenue. Mes amis sont les mêmes ou presque depuis une vingtaine d’années, la maison dans laquelle je vis avec mon père est marqué par trente ans de vie, de joies et de peines, je suis juste Carter enfant de Grayson pour le plus grand nombre même si, j’ai longtemps voulue être tellement plus que ça. Voilà ce que j’étais, ce que je suis censé être…
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28 Août 2012 – New-YorkLa soirée avait été rude mais glorieuse, une fête comme elle en avait rarement vue, des gens complètement allumés et une quantité d’alcool mémorable enfin elle ne peut que l’imaginée. La déduction n’est pas difficile il lui suffit de subir la douleur lancinante qui s’abat sur ses tempes et la lourdeur de sa tête, ainsi c’est littéralement au radar qu’elle se lève et enfile le jean et le t-shirt qui traine sur le sol, elle jette un coup d’œil alentour, autour d’elle quatre ou cinq personnes aussi déphasé qu’elle décuve ici et là, le bonheur des auberges de jeunesse, personne ne vous jugera jamais pour avoir une bonne gueule de bois.
« Hey Carter, ramène moi du café et je te vénérerais jusque la fin des temps gamine. »Elle esquissa un sourire, attrapa son portable et sa carte-passe et se dirigea vers la porte.
« Chacun sa merde Eddy, je suis déjà pas sûr d’y arriver entière. » elle émit un rire taquin et fila avant qu’il n’ait le temps de la supplier davantage. Elle arriva finalement entière dans la salle à la décoration tout droit sorti des années 70, pour peu tous ces motifs lui auraient donné la gerbe, bon dieu, c’était un de ses jours ou l’on se dit qu’on ne boira plus jamais d’alcool, elle se servi un café tiédasse et pris place sans demander son reste à la table où elle et ses compagnons de chambrée avaient l’habitude de prendre leurs petit déjeuner et ou se trouvait déjà une anglaise qu’elle avait rencontré lors de son tout premier jour dans ce taudis, ensemble elles comatèrent un peu, essayant de remettre dans l’ordre les souvenirs de la veille. Elles essayaient de replacer à quel moment elles avaient bien pu se retrouver sur le toit d’un immeuble quand le téléphone de Carter se mit à vibrer sans sa poche, elle hésita une seconde avant de décrocher, car c’était le nom de son père qui s’était affiché sur l’écran et clairement c’était pas le moment d’avoir une conversation avec le paternel mais, allez savoir pourquoi elle se racla la gorge et décrocha.
« Carter hum euh ma chérie il est arrivé quelque chose de grave… » la voix de son père était nouée, il semblait fatigué et le cœur de la jeune femme se mit à battre la chamade, la dernière fois qu’elle l’avait entendu parler de cette façon c’était pour lui annoncer à elle et son frère Matt que leur mère s’était tiré sans se retourner, aussi à son tour sa gorge se serra.
« Papa qu’est ce qui se passe ?? » « C’est Matt chérie, il a eu un accident… il… il faut que tu rentre…» les sanglots qui suivirent parlait à la place de son père, c’était impossible, il se trompait, elle resta là, bouché bée, incapable de décrocher un mot, tout semblait tourné autour d’elle, elle aurait pu vomir si elle avait été capable de faire le moindre mouvement, elle lâcha son téléphone et resta là assise à cette table stoïque et sans expression…il se trompait, c’était impossible…
L’heure qui avait suivi avait vue la fin du périple de Hadley Carter Wuornos et son retour définitif dans la petite ville de Grayson.
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Quatre cent trente trois jours s'étaient écoulé depuis ce macabre coup de téléphone et presque les trois quarts de ce temps à feindre d'allez mieux, à accrocher ce sourire d'apparence sur mes lèvres, j'avait retrouver les murs qui avaient abriter mes jeux d'enfants, ces murs qui dissimulait encore précieusement l'ombre pesante de mon frère.Et pourtant, pourtant les jours semblent lentement se faire moins difficiles, je me surprends même à sourire et à apprécier les moments de joie, ce qui me semblait encore impensable il y a quelques temps. Peut être que ce ne sont que des moments fugaces que cette douleurs reviendra aussi vite qu'elle est partie, au détour d'une rue, en écoutant cette chanson, en entendant ton prénom quand je sais qu'il ne s'agit pas de toi...mais pour la première fois depuis longtemps j'ai envie de profiter de mes journées, de mes nuits...j'ai envie de savoir...peut être devrais-je lire ce stupide journal que tu avais caché, peut-être devrais-je te laisser tes pensées... c'est une question pour laquelle je réserve encore ma réponse.
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Vos sentiments sur Grayson •
Grayson est un bled paumé où il est difficile de passer inaperçu, car tout le monde se connaît, il est rare de voir des étrangers s’y installer, la population ne se renouvelle donc pas vraiment et si pendant longtemps j’ai beaucoup regretté le manque de mouvement et d’évolution dans le coin, je crois qu’avec le temps j’apprécie peut être un peu plus de pouvoir dire que cette ville est un endroit tellement figé qu’il en devient rassurant et presque chaleureux pour ses natifs. On peut en dire ce qu’on veut mais, Grayson c’est chez moi, c’est l’endroit qui abritera probablement pour toujours tous mes souvenirs.